Une campagne sur la castration à vif des porcelets censurée
Le 12 septembre 2016 par Marine Jobert
DR
Un annonceur et un préfet ont décidé d’enlever des affiches dénonçant la pratique de la castration à vif des porcelets. Raison invoquée: risques de dégradation et trouble à l’ordre du public.
Castrés à vif. C’est le sort de 85% des porcs mâles, dont les testicules sont sortis du scrotum incisé sans anesthésie, dès la première semaine de vie. Une pratique fort douloureuse, pratiquée pour prévenir toute odeur de la viande causée par les hormones sexuelles du verrat[1], qui pourrait indisposer les consommateurs (moins d’un sur deux en perçoit l’odeur après cuisson[2]). C’est cela qu’une partie du monde agricole n’a pas souhaité voir placardé sur les murs: en Bretagne comme dans la Sarthe, la campagne d’affichage intitulée «Couic», organisée par l’association Welfarm, a été tout bonnement censurée.
Ordre public menacé
En Bretagne, c’est l’afficheur Clear Channel qui a pris l’initiative de retirer les affiches apposées à Brest, au nom du «principe de précaution», du fait de «risques de mouvements des producteurs autour [des panneaux publicitaires]». A Langueux (près de Saint-Brieuc) et à Saint-Brieuc même (Côtes-d’Armor), les visuels n’ont même pas été utilisés. Dans la Sarthe, c’est le préfet lui-même qui a pris l’initiative de faire enlever les affiches des rues du Mans, «pour prévenir un risque d’atteinte à l’ordre public».
Pratique d’un autre âge
«Ces réactions immodérées apparaissent en décalage avec la démarche de dialogue entamée par Welfarm et avec le ton purement informatif de ses affiches», dénonce l’association, qui déplore d’être ainsi privée «de la possibilité d’informer le grand public sur une pratique d’un autre âge». Près des deux tiers des élevages porcins sont localisés dans le nord-ouest du pays.
Cochons plus gras
Enjoints en 2010 par l’Union européenne de modifier leurs pratiques d’ici le 1er janvier 2018, les producteurs de porcs avaient mené des réflexions depuis quelques années sur les alternatives à la castration à vif. L’Institut national pour la recherche agronomique (Inra) avait notamment exploré deux hypothèses: l’élevage de mâles entiers ou l’immunocastration (par injection d’un vaccin). La première hypothèse impliquerait que les 5% des carcasses de verrats imprégnées fassent l’objet d’une détection olfactive au sein des abattoirs, mais aussi que l’agro-alimentaire renonce à ces cochons plus gras que la castration permet d’obtenir. Les filières de qualité (indications géographiques, comme le jambon de Bayonne par exemple) avaient d’ores et déjà prévenu qu’elles ne se soumettraient pas à cette interdiction.
[1] Une situation qui concerne à peine 5% des carcasses de verrats.
[2] Identifiée par le nez humain comme celle de fèces, ou de naphtalène.
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