Quand des chimistes fraudent le protocole de Montréal
Le 10 mars 2014 par Valéry Laramée de Tannenberg
NASA
C’est une véritable bombe que viennent de lancer 12 climatologues. Dans un article mis en ligne le 9 mars sur le site de Nature Geoscience, ces chercheurs affirment avoir découvert de nouvelles substances artificielles destructrices de la couche d’ozone stratosphérique et contributrices au réchauffement global.
Pour parvenir à ce résultat, les scientifiques ont comparé la composition d’échantillons d’air actuel avec celle de bulles d’air piégées dans les glaces du Groenland, et d’air prélevé entre 1978 et 2012 en Tasmanie, île australienne réputée peu polluée.
Conclusion: les échantillons d’air actuel contiennent trois chlorofluorocarbones (CFC) et un hydrochlorofluorocarbure (HCFC) qui n’étaient pas officiellement répertoriés. Jusqu'à présent, 7 types de CFC et 6 HCFC étaient connus pour leurs effets destructeurs sur l'ozone.
Selon les calculs de l’équipe menée par Johannes Laube (université d’East Anglia), plus de 74.000 tonnes de ces gaz[i], destructeurs d’ozone et dotés d’un solide pouvoir de réchauffement global, ont été émis dans l’atmosphère entre 1978 et 2012, principalement dans des pays de l’hémisphère Nord.
Or le protocole de Montréal interdit depuis 1995 la production des CFC et leur utilisation à partir de 2010. Au nom de ce même accord, l’utilisation de tous les HCFC est fortement restreinte et sera interdite en 2017.
«Notre recherche a mis en évidence 4 gaz qui ne se trouvaient pas du tout dans l'atmosphère jusque dans les années 1960, ce qui suggère qu'ils sont émis par l'activité humaine», écrivent les scientifiques. Deux de ces gaz, un CFC et un HFCF, s'accumulent encore dans l'atmosphère, précise l'étude.
D’où viennent-ils? Mystère. Mais les scientifiques ont leur petite idée. Le CFC 113a serait illégalement utilisé dans la synthèse de pyréthrinoïdes. Comme le HCFC 133a, il peut être utilisé aussi dans la fabrication de fluides réfrigérants. Les CFC 112 et 112a pourraient avoir servi de base dans la production de solvants utilisés par l’industrie électronique. Rien n’étant sûr, les auteurs recommandent aux autorités d’enquêter et de modifier la façon dont les industriels déclarent leurs produits chlorés.
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