Pneumatique: des émissions en roue libre
Le 10 juillet 2020 par Victor Miget
L’usure des pneumatiques émet plus de particules fines que les moteurs. Cette pollution n’est toujours pas réglementée.
Dans une étude publiée en mars dernier, Emissions Analytics, société spécialisée dans l'analyse des émissions de véhicules, avait calculé que l'usure d'un pneu pouvait rejeter jusqu’à 1.000 fois plus de particules fines qu'un moteur.
«En utilisant une berline familiale populaire fonctionnant sur des pneus neufs et correctement gonflés, nous avons constaté que la voiture émettait 5,8 grammes de particules par kilomètre». En Europe, les émissions d’échappement sont limitées à 4,5 milligrammes par kilomètre en Europe: 1.000 fois moins. D’après Emmissions Analytics cela pourrait être encore pire.
La faute à des facteurs aggravants. Plus un véhicule est lourd, plus le phénomène sera important. Or, près de 40% des immatriculations de véhicules neufs en Europe sont des SUV.
Paradoxe: les voitures électriques ne sont pas exemptes de toute reproche, en raison du surpoids occasionnés par les batteries. S’ajoutent la rugosité et la forme de la chaussée, la pression des pneumatiques, le style de conduite (freinage, accélération etc.), ou encore les conditions climatiques.
D’autres données, moins spectaculaires, n’en sont pas moins inquiétantes. En 2019, un rapport du gouvernement britannique intitulé, «Non-Exhaust Emissions from Road Traffic » révélait que 73% des particules PM10 et 60% des PM2.5 émises par le transport routier venaient de l’usure des freins et des pneus.
En 2015, l’association francilienne en charge de la mesure de la qualité de l’air (Airparif) avait calculé que 41 % des particules fines en suspension émises par le trafic routier francilien provenaient de l’abrasion des pneumatiques.
Quid des règlementations ?
«Si les émissions d'échappement sont strictement réglementées depuis de nombreuses années, l'usure des pneus n'est absolument pas plafonnée», s’inquiète Emmissions Analytics.
En la matière tout reste à faire. Dans sa «Stratégie européenne sur les matières plastiques dans une économie circulaire», la Commission européenne évoque la nécessité de réduire les rejets de ces microplastiques, «entre autres au moyen de mesures d'information telles que l'étiquetage et par la mise en place d'exigences minimales pour les pneumatiques».
Nouvel étiquetage
En février, le Conseil européen a adopté de nouvelles règles d’étiquetage des pneumatiques. L'inclusion des émissions de particules occasionnées par l'abrasion des pneumatiques sur les étiquettes a été envisagée. «Cependant, au cours du processus, il a été décidé qu'il n'existait pas actuellement de méthode fiable pour les mesurer, rendant impossible l'inclusion de telles informations», explique une porte-parole de l’ONG Transport&Environment. «Une fois qu'une méthode fiable, précise et reproductible sera disponible, la Commission devrait évaluer la faisabilité d'ajouter ces informations», poursuit-elle.
Faut-il compter sur les équipementiers? Michelin a mis au point un prototype de pneu réalisé à partir de matériaux recyclables bien moins nocifs et biodégradables (bois, papier, bambou). Pour Emissions Analytics, le consommateur doit aussi jeter son dévolu sur des véhicules plus légers, et des pneus de meilleure qualité.
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