Loi sur l’eau: le Sénat préconise le pragmatisme
Le 21 juillet 2016 par Stéphanie Senet

Un rapport sénatorial préconise d’orienter la loi sur l’eau et les milieux aquatiques du 30 décembre 2006, dite Lema, vers davantage de «pragmatisme, réalisme et stabilité».
A l’approche du 10e anniversaire de la Lema, l’heure des nouveaux bilans vient de sonner. Présenté le 20 juillet à la presse, ce rapport du sénateur Rémy Pointereau (Les Républicains, Cher) a été commandé par la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Il commence par rappeler ce que l’on savait déjà: l’Hexagone a échoué à atteindre l’objectif, fixé par l’Union européenne, d’un bon état des masses d’eau en 2015. L’une des missions de la Lema était en effet de mettre la France en conformité avec la réglementation communautaire, après sa condamnation par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), en mars 2001, pour mauvaise qualité des eaux superficielles. C’est raté.
Mais plutôt que de critiquer l’inaction gouvernementale, l’opus sénatorial préfère pourfendre les exigences communautaires qui changent «chaque année». Rémy Pointereau préconise donc de respecter les directives «sans surtransposition française», en fixant des objectifs «réalistes, pragmatiques et stables». «La loi de 2006 était utile mais certainement trop ambitieuse, donc pas facilement réalisable dans les délais impartis», a résumé le sénateur.
Un accès à l’eau potable sous conditions
Basé sur une soixantaine d’auditions, ce rapport souligne l’apport principal de cette loi, soit la consécration du principe d’accès à l’eau potable pour tous. Un droit qui est toutefois garanti de façon partielle puisque l’article 1er stipule que «chaque personne physique, pour son alimentation et son hygiène, a le droit d’accéder à l’eau potable, dans des conditions économiquement acceptables pour tous». Ces «conditions» sont jugées inacceptables par plusieurs ONG dont la Fondation France Libertés, qui est à l’origine d’une proposition de loi visant à garantir un véritable accès à l’eau potable pour tous.
Des agences fortement prélevées
Autre point noir souligné par le rapport: le manque de ressources des agences de l’eau dû aux prélèvements réguliers de l’Etat. Le sénateur propose tout simplement d’interdire cette ponction croissante, qui s’élève à 139 millions d’euros pour l’année 2016.
Au plan quantitatif, il est rappelé que 20% de l’eau distribuée est perdue chaque année à cause des fuites dans les réseaux d’eau potable. Pour y remédier, ce rapport, qui se fait l’avocat des collectivités, préconise d’instaurer une aide de l’Etat pour financer les travaux de réparation.
Revoir les instances de bassin
En matière de gouvernance, le rapport suggère de rééquilibrer la composition des instances de bassin. Une vieille revendication qui permettrait d’accorder un tiers des sièges aux consommateurs et aux associations, un tiers aux collectivités et un tiers aux industriels et aux agriculteurs.
Quant à la compétence relative à la Gemapi[1], nouvellement attribuée aux communes et à leurs groupements, Raymond Pointereau préconise de la transférer à l’Etat, aux régions ou aux agences de l’eau, faute de financements suffisants au niveau local.
Enfin, l’opus propose d’intégrer un volet consacré à l’adaptation climatique dans chaque schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux (Sdage). Pour mémoire, la Lema était la première à aborder cette question dans le cadre d’une gestion des ressources en eau.
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