Le sommet de la (petite) ambition climatique
Le 14 décembre 2020 par Valéry Laramée de Tannenberg
DR
Londres et Paris ont organisé, le 12 décembre un sommet international virtuel sur le climat. Objectif : rehausser l'ambition internationale. Les résultats ne sont pas à la hauteur des espérances.
Le Royaume-Uni a célébré le 5e anniversaire de l’accord de Paris à sa manière. Le 12 décembre, la diplomatie britannique a organisé, avec l’aide de sa consœur française, un sommet climatique international. Ce Climate Ambition Summit a réuni plus de 70 chefs d’Etats et de gouvernements par visioconférence. Chacun disposant de quelques minutes pour esquisser sa politique climatique, décrire sa vision du monde et, le cas échéant, lancer un appel à la communauté internationale.
Brisons le suspens de suite: les annonces importantes ont été rares. Après avoir confirmé son objectif de neutralité carbone pour 2060, le président de la république de Chine a précisé que la seconde puissance mondiale réduirait de 65% l’intensité carbone de son économie entre 2005 et 2030. Ce qui n’est forcément synonyme de baisse des émissions. Entre 1990 et 2020, le facteur carbone du PIB chinois a chuté de 50%, pendant que les émissions réelles quintuplaient.
Renouvelables chinoises
A l’horizon de 2030, le premier émetteur mondial portera à 25% la part d’énergies zéro carbone dans la production d’énergies primaires, a précisé Xi Jinping. La même année, la puissance du parc de production d’électricité renouvelable sera portée à 1.200 GW: +50% qu’en 2018.
Plus inattendu, le premier ministre du Pakistan a signé la fin des constructions de nouvelles centrales électriques à charbon. Imran Kahn promet également que 60% de l’énergie produite en 2030 seront décarbonées. Audacieux pour un pays qui génère 60% de son énergie à partir du charbon, du pétrole et du gaz. L’ancienne star du cricket a également annoncé que le tiers du parc de véhicules légers carburerait à l’électricité dans 10 ans.
confirmation européenne
Auréolée de la décision intervenue un jour plus tôt lors du conseil européen, la présidente de la Commission a confirmé que l’Union européenne s’engageait à réduire de 55+, au moins, ses rejets de Ges entre 1990 et 2030. Quelques heures plus tôt, le premier ministre britannique avait indiqué vouloir réduire de 68% les émissions du Royaume-Uni durant le même laps de temps. Boris Johnson a également annoncé la fin des investissements outre-mer pétroliers britanniques: une économie d’environ 4 milliards d’euros par an.
Comme la Norvège, l’Islande reprend à son compte les nouveaux objectifs de l’Union européenne. En y ajoutant une touche technologique inédite. Dans sa mini allocution, la première ministre Katrín Jakobsdóttir a indiqué que son pays serait le premier à exploiter, à l'échelle industrielle, un système de captage du CO2 atmosphérique (lire encadré).
Du Malawi au Népal, une vingtaine de pays ont confirmé ou indiqué qu’ils s’engageaient sur la voie de la neutralité carbone. Grâce à ses centrales hydroélectriques, l’Autriche prévoit même d’atteindre cet objectif dès 2040.
bilan mitigé
Quel bilan peut-on tirer de ce sommet virtuel? Au plan climatique, on pouvait s’attendre à mieux. Dans son discours de clôture, Alok Sharma n’a d’ailleurs pas caché sa déception: «Nous avons 45 contributions déterminées nationalement (NDC), 24 engagements de neutralité carbone et 20 plans d’adaptation et de résilience. […] Ce sommet nous a-t-il permis de progresser? La réponse est oui. Est-ce suffisant pour nous mettre sur la voie d’un stabilisation du réchauffement à 1,5 °C ? Mes amis, nous devons être honnêtes avec nous-mêmes, la réponse est clairement non», a martelé le président de la COP 26.
La pandémie de Covid-19 a clairement entravé la marche vers la décarbonation. Pratiquement aucun Etat n’a ainsi déposé la seconde mouture de sa NDC dans les délais impartis par l’accord de Paris (mars 2020). Les Etats-Unis et le Brésil restent, pour le moment, dirigés par des présidents climato-sceptiques. Peu d’espoir aussi à attendre de ce côté-là. Pas plus que de la part d'autres grands pays émetteurs, comme l'Inde, la Russie ou l'Australie.
Bonne surprise britannique
La bonne surprise est venue du Royaume-Uni. Nombre d’observateurs craignaient que l’administration britannique, mobilisée par la pandémie et les négociations du Brexit, ne soit au rendez-vous du climat. Il n’en est rien. Nouveaux objectifs d’atténuation, doublement du fonds britannique International Climate Finance[1], publication, ce 14 décembre, de sa stratégie de décarbonation de l’énergie, Londres semble prêt à jouer son rôle de tambour-major des négociations climatiques mondiales. L'agenda est d'ailleurs chargé: achèvement des règles d'application de l'accord de Paris, rehaussement de l'ambition des NDC, financement international. La question est de savoir quand la Covid-19 permettra-t-elle que les tractations reprennent?
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