Le Parlement européen veut interdire totalement la pêche électrique
Le 16 janvier 2018 par Stéphanie Senet
Appelé à se prononcer en séance plénière, ce 16 janvier, sur la révision du règlement concernant les mesures techniques de la pêche, le Parlement européen a appelé à appliquer à la lettre l’interdiction de la pêche électrique. Et à supprimer les dérogations existantes.
L’équipe de l’association Bloom peut fêter sa victoire. Et aller dormir. Après s’être mobilisée, pendant des semaines, sur les ravages de la pêche électrique, les eurodéputés ont voté -par 402 voix contre 232[1]- l’amendement 303 en faveur d’une interdiction totale et définitive de la pêche électrique dans les eaux européennes.
Brûlures, ecchymoses, déformations du squelette
Cette pratique, qui envoie des décharges électriques dans les sédiments pour capturer plus facilement les poissons plats, provoque de nombreux dommages sur la faune marine. Au programme: brûlures, ecchymoses et déformations du squelette consécutives à l’électrocution.
Pression des Pays-Bas
Ce qui avait conduit l’Union européenne a l’interdire en 1998[2]. Mais un règlement adopté en 2007 a introduit, «à titre expérimental», des exceptions à hauteur de 5% de la flotte de chalutiers à perche de chaque Etat membre. Bloom a réussi à prouver, début janvier, qu’il avait été adopté sous la pression des pêcheurs néerlandais, la Commission européenne ayant balayé, à cette occasion, l’avis défavorable de son comité scientifique. Aujourd’hui, 84 navires des Pays-Bas pratiquent la pêche électrique en mer du Nord. Et la Commission voulait encore élargir les exceptions pour l’étendre un peu plus dans cette zone de pêche.
Mobilisation collective
«Nous sommes heureux et soulagés que le Parlement s’oppose fermement à une pratique destructrice qui n’a été autorisée en Europe qu’en raison d’une collusion immorale entre lobbies industriels et institutions», commente Claire Nouvian, présidente de Bloom.
Le succès de l’ONG tient à sa forte mobilisation au cours des derniers mois (dépôt d’une plainte contre les Pays-Bas en octobre, révélations sur le rapport scientifique écarté par la Commission européenne) ainsi qu’à sa création d’une coalition informelle, réunissant ONG (End Ecocide on Earth, Blackfish, Ourf Fish, Blue Marine Foundation, etc) mais aussi pêcheurs (Plateformes LIFE et Petite pêche artisanale, fileyeurs des Hauts de France, etc). Les petits pêcheurs français et anglais s’estiment menacés, à cause de «la concurrence déloyale» des pêcheurs néerlandais.
La France acquiesce
Dans le passé, le gouvernement français s’est exprimé en faveur d’une interdiction effective de la pêche électrique, notamment par la voix de l’ancienne ministre de l’écologie Ségolène Royal. Même credo pour son successeur Nicolas Hulot, qui a affirmé, ce 16 janvier sur Twitter, que «la France souhaite que les pratiques de pêche européennes restent un modèle de référence respectueux des ressources naturelles et de l’environnement. Nous saluons le vote du Parlement européen en faveur de l’interdiction de la pêche électrique, pratique dangereuse pour la biodiversité».
Premier pas
Ce vote du Parlement n’est que le premier pas d’un long processus législatif. Pour être effective, l’interdiction totale de la pêche électrique doit encore faire l’objet de négociations, dans le courant de l’année, entre le Conseil européen[3] et la Commission, en vue de trouver un compromis.
[1] Pour 40 abstentions
[2] Règlement du 30 mars 1998 sur la conservation des ressources de pêche
[3] qui représente les Etats membres
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