La déforestation, une aubaine pour le paludisme
Le 23 décembre 2015 par Romain Loury
La déforestation n’est pas seulement un désastre environnemental et climatique, c’est aussi une menace pour la santé humaine. Exemple sur la partie malaisienne de l’île de Bornéo, où elle fait flamber les cas de paludisme, comme le révèle une étude publiée dans la revue Emerging Infectious Diseases.
C’est l’une des nombreuses causes des maladies émergentes, en particulier celles de type vectoriel: en perturbant l’équilibre écologique des bordures forestières, la déforestation peut accroître les contacts entre l’agent microbien d’une maladie, ses réservoirs et ses vecteurs, favorisant leur transmission à l’homme.
Combinant registres hospitaliers et données satellitaires de couverture forestière, Kimberly Fornace, de la London School of Hygiene and Tropical Medicine, et ses collègues en font une claire démonstration avec le paludisme sur l’île de Bornéo: confiné au Sud-est asiatique, Plasmodium knowlesi, l’un des parasites responsables du paludisme, sévit bien plus dans les villages qui se sont livrés à une intense déforestation les années précédentes.
Analysant 739 cas survenus entre 2008 et 2012 dans les districts de Kudat et Kota Marudu, à l’extrême nord de l’île de Bornéo, les chercheurs révèlent que toute perte, au cours de ces 5 années, d’au moins 14% de la couverture forestière dans un rayon de 2 kilomètres autour du village multiplie par 2,22 l’incidence du paludisme par rapport aux villages qui n’ont déforesté que moins de 8%.
Des conditions idéales pour le parasite
Comment expliquer ce phénomène? Peut-être par une concentration des réservoirs sauvages de Plasmodium knowlesi, en l’occurrence le macaque crabier (Macaca fascicularis) et le macaque à queue de cochon (Macaca nemestrina): forcés de se regrouper sur les petits pans résiduels de forêt, ils favorisent l’accumulation du parasite.
Autre explication, les moustiques forestiers seraient supplantés par des espèces cousines, peut-être vecteurs plus efficaces du parasite. A moins que, une fois de plus, l’homme ne soit à lui-même son meilleur ennemi: se rendant plus souvent sur un terrain déforesté, notamment pour y cultiver ses nouvelles terres, il se crée tout simplement plus d’occasions de contact avec le parasite.
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