GES: taxer les aliments pour réduire les émissions?
Le 07 novembre 2016 par Romain Loury

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Une taxe sur les aliments, selon leur empreinte carbone, aurait non seulement des effets bénéfiques sur le climat, mais aussi sur la santé, selon une étude britannique publiée lundi 7 novembre dans Nature Climate Change.
Du champ à la fourchette, notre alimentation est responsable d’environ un quart des émissions actuelles de gaz à effet de serre. Cette part devrait fortement s’accroître, du fait de la croissance démographique, mais aussi de l’occidentalisation du régime alimentaire dans les pays en développement -toujours plus friands de produits d’origine animale.
Face au hiatus croissant entre sécurité alimentaire et lutte contre le réchauffement, Marco Springmann, de l’université d’Oxford, et ses collègues ont modélisé l’efficacité d’une taxe mondiale sur les aliments, selon leur empreinte carbone. Se basant sur un prix de 52 dollars par tonne équivalent CO2 (téqCO2), les chercheurs ont évalué, en fonction de l’augmentation des prix, l’évolution attendue de la consommation, jusqu’aux bénéfices climatiques et sanitaires.
10% de GES alimentaires en moins
Sur les produits les plus émetteurs de gaz à effet de serre (bœuf, agneau, produits laitiers, huiles végétales), les prix s’élèvent ainsi de 15% à 40%, avec une baisse de 6% à 13% de la consommation mondiale. Quant aux fruits et légumes, la taxe demeure inférieure à 3%, sans impact significatif sur les achats.
Résultat, les émissions mondiales de GES pourraient diminuer de 1 gigatonne équivalent CO2 (GtéqCO2) par an, soit 9,3% des GES d’origine alimentaire. Ou encore 10% des efforts d’atténuation nécessaires, en 2020, pour rester en-deçà d’un réchauffement de +2°C.
Environ deux tiers de cette baisse serait liés à une moindre consommation de bœuf, un quart à celle de produits laitiers. C’est des pays à revenu intermédiaire qu’émaneraient les principaux bénéfices (environ trois quarts de la réduction), loin devant les pays à revenu élevé (entre 8% et 9%).
Bilan sanitaire globalement positif
Côté sanitaire, la situation est plus mitigée: a priori, le bilan mondial serait certes bénéfique, avec 107.000 décès évités par an, notamment d’origine cardiovasculaire. Dans le détail, 115 pays parmi les 150 évalués verraient leur mortalité diminuer d’un total de 146.000 décès par an, tandis que 31 autres, notamment en Afrique, connaîtraient un surplus annuel de 29.000 décès, en raison de la malnutrition.
Selon les chercheurs, le scénario le plus efficace consisterait à fixer une taxe sur tous les aliments, à l’exception d’une réduction de prix sur les fruits et légumes, voire une compensation financière pour les consommateurs des pays les plus pauvres.
Dans un tel cas, 510.000 décès par an pourraient être évités dans le monde, sans qu’aucun pays soit perdant. En matière d’émissions, la baisse serait de 919 mégatonnes équivalent CO2 (MtéqCO2) par an, soit 8,6% des émissions liées à l’alimentation.
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