Fukushima: une pollution essentiellement locale
Le 26 avril 2016 par Valéry Laramée de Tannenberg

VLDT
Des rejets moindres qu’à Tchernobyl, dont une bonne partie est tombée dans le Pacifique, ont évité au Japon une contamination comparable à celle subie depuis 30 ans par l’Europe orientale.
Contrairement à Tchernobyl, les rejets de radioactivité de Fukushima n’ont pas été continus, mais intermittents. à chaque explosion, à chaque dépressurisation des enceintes de confinement, les réacteurs japonais ont relâché dans l’environnement des ‘bouffées’ de gaz rares, d’iodes et de césiums. Selon les estimations, l’activité totale de ces rejets varie entre 6 et 16 milliards de milliards de becquerels. Comme en Ukraine en 1986, l’essentiel de cette radioactivité est imputable à des radioéléments à vie courte (iodes, xénon 133). Du fait, de sa persistance, c’est le césium 137[1] qui posera le plus de problème. D’autant que ses rejets ont été importants: environ le quart de ceux de Tchernobyl.
9.000 km2 contaminés
Bien que des hausses de la radioactivité aient été détectées dans la région de Tokyo plusieurs jours après les explosions, les retombées terrestres de Fukushima sont essentiellement restées cantonnées dans la région de la centrale. L’essentiel de ces retombées forment un panache d’une soixantaine de kilomètres de long (orienté vers le nord-ouest depuis la centrale) et d’une vingtaine de kilomètres de large, en moyenne. Soit environ 1.200 km, ce qui représente moins de la moitié de la zone d’exclusion de Tchernobyl. En dehors de la préfecture de Fukushima, on trouve des dépôts épars, parfois fortement contaminés. C’est le phénomène des taches de léopard, déjà identifié en Europe orientale. Au total, la superficie du territoire japonais contaminé atteint 9.000 km2. Tchernobyl a pollué plus de 150.000 km2 en Europe.
Deux puissants courants
Car, dans leur malheur, les Japonais ont eu de la chance. Une bonne part des particules radioactives ont été rejetées en mer. Cette région du Pacifique Nord est, en outre, parcourue (du sud vers le nord) d’un puissant courant, le Kuroshio, dont la puissance et l’étendue sont comparables à celle du Gulf Stream. Aidé de l’Oyashio (autre courant venant du nord), ce serpent de mer a contribué à diluer fortement dans l’océan les retombées radioactives. Des retombées qui ont été complétées par les rejets de 10.000 tonnes d’eau utilisées par les techniciens de la centrale pour refroidir les réacteurs et les piscines de combustibles endommagés. Selon l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), ce sont 27 millions de milliards de becquerels de césium 137 qui ont ainsi été jetés à la mer. «Le plus important apport ponctuel de radionucléides dans le milieu marin jamais observé», souligne l’institut français. C’est comparable aux retombées marines de Tchernobyl, mais très inférieur à celles des essais nucléaires atmosphériques (950 millions de milliards de becquerels).
Plus aucune trace en France
En France métropolitaine, les radionucléides issus de l’accident de Fukushima ont été très faibles et fugaces: des traces d’iode 131, césiums 134 et 137 ont été détectées de fin mars à mai 2011 dans l’air, les eaux de pluie et dans quelques denrées (légumes-feuilles, lait…) avec des concentrations 500 à plus de 1.000 fois inférieures à celles mesurées début mai 1986 suite à l’accident de Tchernobyl. L’influence de ces dépôts n’est plus mesurable depuis mi-2011, indique l’IRSN dans un rapport publié le 26 avril.
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