Elevage: la fin des antibiotiques d’importance critique
Le 25 mars 2016 par Romain Loury
Dès le 1er avril, une cinquantaine d’antibiotiques jugés d’importance critique pour la santé humaine ne pourront plus être utilisés en médecine vétérinaire, notamment dans les élevages, selon des textes publiés au Journal officiel. Seuls neuf d’entre eux resteront autorisés, mais de manière restreinte.
Considérée comme une grave menace sanitaire, la résistance des bactéries aux antibiotiques ne cesse de croître. En cause, l’usage immodéré de ces médicaments, notamment dans les élevages: plusieurs d’entre eux continuent à être utilisés alors qu’ils sont jugés d’importance critique en médecine humaine, du fait qu’ils constituent souvent l’une des dernières barrières contre les germes résistants.
En France, la sensibilisation des vétérinaires a eu des effets notables: plusieurs antibiotiques considérés comme critiques, notamment les fluoroquinolones et les céphalosporines de troisième et quatrième génération, ont récemment vu leur usage diminuer dans les élevages animaux.
Une liste d’antibiotiques interdits
Le gouvernement a toutefois décidé de passer à la vitesse supérieure, en fixant un cadre plus contraignant: dans le cadre de la loi d’avenir pour l’agriculture, promulguée en octobre 2014, les ministères de la santé et de l’agriculture ont publié, vendredi 25 mars, un arrêté fixant la liste des antibiotiques critiques, dont 47 seront interdits d’usage en médecine vétérinaire.
Neuf autres médicaments, à savoir trois céphalosporines de troisième génération, une de quatrième génération et cinq fluoroquinolones, pourront encore être utilisés, mais de manière restreinte, n’étant réservé qu’aux seuls usages curatifs et métaphylactiques.
L’usage curatif consiste à ne traiter que les animaux malades, l’usage métaphylactique à administrer le médicament aussi bien aux individus malades qu’aux animaux sains d’un même groupe, ces derniers étant à risque élevé de contracter la maladie par contagion.
Exit donc les utilisations purement préventives des antibiotiques critiques, en l’absence de cas de maladie. A ce jour, ce genre d’usage avait par exemple lieu lors du regroupement de groupes d’animaux issus d’élevages différents, par simple mesure de précaution.
Neuf critiques, 45 interdits
Autre restriction, les neuf antibiotiques encore autorisés ne pourront être utilisés «qu’en l’absence de médicament ne contenant pas ces substances suffisamment efficace ou adapté pour traiter la maladie diagnostiquée», indique un décret publié vendredi 18 mars.
Ils ne pourront être prescrits qu’après réalisation de tests sur la souche bactérienne, permettant de s’assurer qu’un autre antibiotique ne pourrait pas être utilisé. Leur prescription ne devra pas dépasser une durée d’un mois, et ne sera pas renouvelable.
Pour l’instant, nulle trace dans l’arrêté publié ce vendredi de la colistine. Après leur première description en Chine, en novembre 2015, les résistances à cet antibiotique de dernier recours, utilisé pour les bactéries réfractaires à tout autre médicament, ont été observées partout où on les a cherchées, y compris en France.
Ce qui inquiète fortement les infectiologues, qui craignent d’être bientôt confrontés à des maladies incurables. L’Agence européenne du médicament (EMA) prévoit de réactualiser prochainement ses recommandations d’usage.
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