Des produits bio garantis français et équitables
Le 18 février 2020 par Stéphanie Senet
Pour lutter contre une offre de produits bio à prix cassés, la Fédération nationale de l’agriculture biologique (Fnab) lance, ce 18 février, un label « bio, français et équitable » (BFE) qui garantit une juste rémunération des producteurs.
Après les distributeurs bio « responsables », les producteurs de bio « français et équitable». C’est bel et bien sur le terrain de la certification que le secteur historique du bio cherche à se démarquer des enseignes de la grande distribution. Malgré elle, la Fnab est ainsi apparue comme le garant des valeurs de l’agriculture bio face à certaines dérives. En témoigne son dernier coup de gueule[1] contre la possible labellisation en bio de fruits et légumes hors saison cultivés sous serres chauffées. Avec succès, sa mobilisation a conduit le Comité national de l’agriculture biologique (Cnab) à imposer, le 11 juillet dernier, le respect des cycles naturels aux productions sous serres chauffées.
87 magasins dans le Sud-Ouest
Aujourd’hui, elle plaide pour du bio produit en France, qui garantit une juste rémunération des producteurs ainsi qu’une relation commerciale équitable, en s’appuyant sur le nouveau label BFE. Celui-ci est le fruit d’un groupe de travail mis en place entre la Fnab et le groupe de surgelés Picard qui lance, à partir du 2 mars, une gamme de produits «bio et locaux» dans 87 magasins de Nouvelle-Aquitaine et d’Occitanie, les deux régions françaises où l’essor des exploitations en bio est le plus important selon l’agence Bio.
Contrats tripartites
Le label BFE sera apposé, pour la première fois, sur 4 légumes (courgette, maïs, haricot vert et carotte). Pour cela, le groupe de surgelés a signé des contrats tripartites de trois ans avec trois organisations de producteurs et un transformateur du Sud-Ouest. Au-delà des critères de localisation de la production et de rémunération des producteurs, l’enseigne s’est engagée à éventuellement réviser le prix chaque année en fonction de l’évolution des coûts de production. Le groupe va aussi plus loin que le cahier des charges du label BFE en versant 1% du montant annuel des ventes des produits de cette gamme dans un fond de développement géré par des organisations de producteurs partenaires.
Idée d’un label national
«Le marché biologique se développant, l’opportunité s’est présentée de construire des partenariats forts avec des entreprises de l’agro-alimentaire sur une bio qui corresponde à nos valeurs», a déclaré Stéphanie Pageot, secrétaire nationale en charge des questions économiques à la Fnab. «Picard s’est engagé de façon très volontaire. Ils ont tout de suite dit oui. Nous avons cherché à valoriser cet engagement, c’est comme ça que l’idée d’un label est venue», a-t-elle poursuivi. Avec un taux de conversion en croissance de plus de 15% par an, l’agriculture biologique est sortie de sa niche. Mais les agriculteurs veulent éviter que la grande distribution ne casse les prix avec des produits bio utilisés comme produits d’appel.
Dans une étude publiée en janvier, le cabinet Xerfi souligne le risque de dénaturation de la bio concentrée en GMS[2]. «Son changement d’échelle risque de l’éloigner de ses valeurs originelles et de la faire happer par les grandes marques de l’agriculture conventionnelle et de la grande distribution», affirment ses auteurs. Pour la première fois, en 2018, les GMS ont dépassé, en chiffre d’affaires, les enseignes spécialisées comme Biocoop. Elles représentent désormais 52% du marché selon l’agence Bio.
Outil d’innovation
Publié ce 18 février, le cahier des charges du label BFE vise les opérateurs, intermédiaires et propriétaires de marques. Son respect sera contrôlé par un organisme d’évaluation, précise la Fnab. «Le label bio européen est un formidable outil de transition agricole mais il n’englobe pas tout, il y a des tas de nouvelles questions qui se posent. Et les paysans de la Fnab sont prêts à s’engager plus encore auprès des consommateurs sur la biodiversité, le climat, le bien-être animal par exemple. Ce label pourrait être notre outil d’innovation bio», conclut Guillaume Riou, président de la Fédération.
[1] Auquel s’est associé le Syndicat des distributeurs et transformateurs de bio (Synabio)
[2] Grandes et moyennes surfaces
POUR ALLER PLUS LOIN
Dans la même rubrique
Vigne: la nouvelle bataille de la Marne
20/12/2017
EGA: augmenter le revenu des agriculteurs avant de changer leurs pratiques
11/10/2017
En Irak, la pollution de guerre tue aussi
23/08/2016
Moscou ne voit pas les gaz de schiste d’un bon œil
16/10/2013
Empêcher une banque d’investir dans une centrale nucléaire, mode d’emploi
03/05/2013
20 € par an et par élève pour des cantines un peu plus bio et locales
03/09/2018