Convention climat: la facture reste à établir
Le 22 juin 2020 par Stéphanie Senet
Si les Conventionnels ne communiquent aucun chiffrage, ils ont sélectionné les modes de financement de leurs mesures. Ils sont nombreux.
Les conseilleurs sont rarement les payeurs. Et cette fois encore, l’adage se vérifie. Les Conventionnels ont certes prévu de faire évoluer nos mode de vie, nos systèmes de production, notre mobilité, mais ils se sont bien gardés d’estimer le montant de l’investissement à consentir pour se décarboner ainsi. Ne leur jetons pas la pierre. Rares sont les textes de loi à publier pareille évaluation. Le plan national intégré énergie climat[1] n’indique pas non plus à combien le gouvernement évalue le prix à payer pour atteindre la neutralité carbone.
Ce que ne font, en revanche, ni l’exécutif, ni le législatif, c’est d’imaginer comment financer leurs mesures. Les «150» se sont livrés à cet exercice. Périlleux, forcément. Surtout si l’on s’aventure dans les sombres arcanes de la fiscalité.
Contrairement à ce qu’annoncent certains observateurs, la tarification du carbone est bien l’un des outils proposés. Certes, rien à voir avec la «taxe» qui avait mis les gilets jaunes sur les ronds-points. Mais elle est bien là. Sous la forme d’une «écocontribution kilométrique renforcée» frappant les billets d’avion ou d’une taxation du carburant de l’aviation de loisir. Que Ségolène Royal se rassure, la fiscalité post-convention ne sera pas seulement «punitive». Elle sera aussi incitative.
Les conventionnels proposent de moduler les taxes sur les contrats d’assurance selon le niveau d’émission du véhicule. Les voitures les plus propres bénéficieront aussi d’un bonus plus élevé.
Fiscalité toujours, les citoyens proposent de renforcer la taxation des transactions financières[2] et la taxe des opérateurs de services numériques (GAFA)[3] déjà en vigueur en France. Ils veulent aussi créer une taxe sur la publicité et sur les produits alimentaires nocifs.
TVA à 5,5%
Côté TVA, ils préconisent de réduire le taux frappant les billets de train (une mesure copiée sur l’Allemagne), le transport de marchandises fluvial et maritime, les produits issus de l’économie circulaire, les pièces détachées et les services de réparation (vieille demande des ONG) ainsi qu’une taxe modulée favorisant les produits de proximité (circuits courts).
En toute logique, les «150» veulent réduire les avantages fiscaux accordés aux professions dont l’activité est défavorable à l’environnement, sans toutefois les nommer. Ils veulent au contraire doter d’avantages les entreprises ayant «un bilan ou une évolution positive en matière de carbone».
Epargne fléchée
A noter que la mesure ayant recueilli le plus fort soutien des citoyens reste le fléchage de l’épargne réglementée, notamment par la Caisse des dépôts, vers le financement de projets à faible ou zéro intensité carbone. Une mesure qui sera facilitée par la prochaine entrée en vigueur du règlement européen sur la taxonomie.
Enfin, la proposition d’un impôt écologique sur les grandes fortunes n’a évidemment aucune chance d’aboutir aprèsla suppression de l’ISF par le président Macron.
[1] Synthèse de la SNBC et de la PPE réalisée à la demande de la Commission européenne.
[2] Plusieurs options sont présentées dont une hausse du taux à 0,5%, taxation à la vente d’actions plutôt qu’à l’achat
[3] Hausse à 4% du chiffre d’affaires réalisé sur le sol français
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