Comment les collectivités peuvent faire pousser des projets agricoles
Le 02 octobre 2020 par Stéphanie Senet

Une plateforme collaborative en ligne a été lancée, le 1er octobre, pour recenser les bonnes pratiques de préservation des terres agricoles. Un outil précieux pour les collectivités locales qui disposent de plusieurs leviers pour stopper leur disparition et favoriser l’installation de nouveaux agriculteurs.
Création d’une zone agricole protégée, d’une régie agricole, de bourses au foncier… Techniques, et souvent complexes, plusieurs outils existent pour permettre aux communes de maîtriser le foncier agricole et de favoriser l’installation d’agriculteurs sur leur territoire. Des outils encore méconnus que la plateforme Récolte vise à diffuser largement en les illustrant par des expériences réussies. Une cinquantaine de bonnes pratiques sont déjà mises en ligne, comme la zone agricole protégée de la Roquebrussanne (Var) ou la régie agricole de Mouans-Sartoux (Alpes-Maritimes).
Une plateforme collaborative
«Nous assistons à un foisonnement de projets locaux peu connus car ils sont rarement financés par l’Etat. Avec cette plateforme, nous voulons les valoriser et susciter la participation des internautes pour qu’ils nous signalent de nouvelles initiatives et nous aident à actualiser les informations sur les projets signalés», explique Coline Perrin, géographe à INRAE, qui a eu l’idée de cette plateforme nationale avec Valérie Pommet, de l’association Terre de Liens. Le site Récolte a d’ailleurs été développé conjointement par l’institut de recherche et l’association citoyenne.
Trois leviers d’action
«Globalement, les collectivités peuvent s’appuyer sur trois modalités d’action pour protéger les terres agricoles de leur territoire. Elles peuvent agir sur les zonages d’urbanisme, acquérir ou remobiliser des terres, des friches par exemple, et elles peuvent contribuer à l’animation foncière au niveau local, pour faciliter les transactions en faveur des agriculteurs», poursuit la chercheuse en géographie, co-auteur du livre Le foncier agricole dans une société urbaine (Ed Cardère).
Plan local d’urbanisme
En matière de zonage, les communes peuvent ajuster le règlement de la zone agricole inscrite dans leur plan local d’urbanisme (PLU) pour faciliter l’installation de nouveaux agriculteurs et éviter le mitage du foncier. «Deux outils spécifiques leur permettent aussi de protéger des zones de façon pérenne, comme la zone d’agriculture protégée (ZAP) et le périmètre de protection des espaces agricoles et naturels périurbains (PAEN), qui ne peuvent être modifiés que par intervention de l’Etat», précise Coline Perrin.
Zone sécurisée, marché dynamique
La commune varoise de La Roquebrussanne a choisi d’actionner une ZAP en 2013 après qu’un diagnostic foncier a révélé la présence importante de friches agricoles. En 5 ans, une quarantaine d’hectares ont été remis en culture, pour la plupart en vignes, ce qui a permis de faire émerger 11 activités agricoles sur le territoire. «Le marché redevient dynamique car la destination agricole des terres est sécurisée sur le long terme » la zone est sécurisée en matière foncière», analyse la chercheuse d’INRAE.
Propriété foncière
Deuxième levier, l’acquisition foncière ou la mobilisation de terres en friches appartenant à la commune a permis à la métropole de Montpellier de lancer un appel à projets en 2016 pour attribuer une dizaine d’hectares à deux projets en faveur du bio et du circuit court. Résultat : un maraîcher en Amap et un collectif agricole (maraîchage, traiteur et accueil pédagogique pour les enfants) ont pu obtenir des baux pour s’installer sur ces terres publiques.
Animation locale
Dernière hypothèse, la commune peut contribuer, avec la Safer[1], à l’animation foncière en mettant en relation propriétaires et agriculteurs, en créant des bourses au foncier, ou en sollicitant le département pour lancer une procédure de remembrement favorable à la remise en culture de friches. C’est ce qu’a choisi la commune de Claira (Pyrénées Orientales), au Nord de Perpignan, qui avait recensé une multitude de micro-parcelles en friches de 0,3 à 0,5 hectare. Abritant des dépôts sauvages de déchets, ces terres ont pu être remises en culture grâce à l’embauche d’une personne à temps plein, qui a convaincu les propriétaires d’accepter leur mise à disposition gratuite en échange d’une réduction de taxe foncière. L’opération a permis à des éleveurs pyrénéens de venir cultiver du fourrage sur 70 hectares.
Précieuse, cette plateforme ne demande qu’à être connue. L’équipe de Récolte compte mobiliser les acteurs par des webinaires thématiques et un séminaire annuel pour créer une communauté de collectivités dynamiques en matière de foncier agricole. Une excellente piste pour accélérer leur transition agricole et alimentaire.
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