Biodiversité européenne: des moyens inégalement alloués
Le 30 août 2017 par Romain Loury

Les outils mis en place par l’UE pour protéger la biodiversité sont-ils bien répartis entre les pays ? Plutôt bien, révèle une étude publiée dans la revue Conservation Biology, mais quelques pays semblent moins bien dotés que d’autres.
Réseau Natura 2000, projets LIFE, mesures agro-environnementales et climatiques (Maec)… l’UE ne lésine certes pas sur la protection de la biodiversité. Pourtant, ces ressources ne sont pas toujours allouées aussi bien qu’elles devraient l’être, révèle l’étude menée par David Sánchez-Fernández, de l’Institut des sciences de l’environnement de l’université de Castille-La Manche (Tolède), et ses collègues.
Les chercheurs ont analysé, pour chacun des 28 pays de l’UE, plusieurs indicateurs de biodiversité (nombre total d’espèces, nombre d’espèces endémiques, nombre d’espèces d’intérêt communautaire) en fonction de ces différentes aides (srface Natura 2000, financement Maec, nombre de projets LIFE). Résultat: les cartes publiées par les chercheurs révèlent une répartition dans l’ensemble plutôt équitable, mais qui demeure entachée de plusieurs inégalités.
La France mieux financée que le Portugal
Plusieurs pays sont ainsi sous-dotés: quel que soit le type d’espèces ou de financement, le Portugal, la Slovaquie, la Hongrie, et particulièrement la Grèce et la République tchèque sont moins gâtés que la moyenne européenne. A l’inverse, des grands pays, surtout l’Allemagne et le Royaume-Uni, mais aussi la France et la Finlande, sont plutôt favorisés par l’UE.
Ci-dessus: Répartition des outils UE en fonction du nombre total d’espèces (ligne 1), d’espèces endémiques (ligne 2), d’espèces d’intérêt communautaire (ligne 3). A gauche, surface du réseau Natura 2000 (% du territoire total); à droite, nombre de projets LIFE. Les pays en rouge sont ceux jugés sous-dotés, au vu de leur biodiversité (Sánchez-Fernández et al., Conservation Biology)
Les grands pays favorisés
Comment expliquer ces inégalités? En grande partie par la taille des pays, constatent les chercheurs: il existe «un conflit d’intérêt inévitable entre l’usage des terres et l’espace disponible [d’intérêt pour la protection de la biodiversité], forcément moins important dans les pays les plus larges». Et à biodiversité égale, les chercheurs observent aussi que les pays ayant une plus grande production de recherche sur la biodiversité ont, en toute logique, plus facilement accès aux projets LIFE.
Pour David Sánchez-Fernández, «les outils de l’UE devraient garantir que tout pays ayant de plus hauts niveaux de biodiversité obtiennent plus de financement et de ressources que d’autres pays moins dotés en espèces».
Les oiseaux, «groupe star»
L’équipe note par ailleurs des disparités selon le groupe taxonomique: en n’analysant que les espèces d’oiseaux, les moyens pour la biodiversité sont en effet bien répartis. Pas étonnant: les oiseaux, «groupe star» de la protection de l’environnement, disposent de leur propre directive européenne. Ce n’est pas le cas d’autres groupes (mammifères, amphibiens, poissons, insectes), où la corrélation est bien plus faible.
Cette bonne répartition pour les oiseaux «n’implique pas forcément qu’ils soient de bons indicateurs de la biodiversité. En d’autres termes, il n’est pas possible de se faire une idée des menaces qui pèsent sur d’autres groupes taxonomiques en se bornant à étudier les oiseaux», juge David Sánchez-Fernández.
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