Responsabilité des constructeurs et du maître d'ouvrage pour le bruit occasionné par un chantier
Le 07 novembre 2005 par Clary Lurati, Envirodroit.net pour le JDLEDans un arrêt du 22 juin 2005, la Cour de cassation a déclaré solidairement responsables le maître d'ouvrage, le constructeur et l'entrepreneur pour les troubles de voisinage occasionnés par les bruits d'un chantier.
Une société, avec le concours d'une autre société chargée de la "gestion du projet" et d'un entrepreneur, a fait procéder à la rénovation totale de l'hôtel qu'elle exploite. Les travaux ont occasionné des nuisances aux immeubles voisins, exploitant tous deux des hôtels.
Ces hôtels voisins ont demandé réparation de leur préjudice devant le tribunal d'instance tout d'abord puis devant la Cour d'appel ensuite. Ceux-ci avaient tout deux répondu positivement à leur demande.
La cour d'appel a notamment condamné la société chargée de la "gestion du projet", c'est-à-dire le constructeur, à payer des sommes en réparation aux hôtels voisins. La Cour de cassation confirme cette décision car, selon elle, les constructeurs sont, pendant le chantier, les voisins occasionnels des propriétaires voisins lésés. Or, le propriétaire de l'immeuble auteur des nuisances, et les constructeurs à l'origine de celles-ci sont responsables de plein droit vis-à-vis des voisins victimes, sur le fondement de la prohibition du trouble anormal de voisinage.
La cour d'appel a également condamné le constructeur et l'entrepreneur à rembourser au maître de l'ouvrage les sommes mises à sa charge au profit des propriétaires voisins.
La Cour de cassation énonce qu'il n'était pas démontré par les contrats, les correspondances échangées et le rapport des experts que le maître de l'ouvrage ait été pleinement informé des risques de troubles au voisinage. Ainsi, comme la cour d'appel, la Cour de cassation estime que la société maître de l'ouvrage, du fait de la subrogation dont elle était bénéficiaire dans les droits des victimes, était fondée à obtenir le remboursement des deux autres sociétés auteurs du trouble. La Cour de cassation ajoute que la responsabilité de ces sociétés vis-à-vis du maître de l'ouvrage n'exigeait pas la caractérisation d'une faute.
Pour mémoire, la théorie des troubles du voisinage a un fondement jurisprudentiel. Elle a été créée par un arrêt de la Cour de cassation du 27 novembre 1844 relatif à une pollution industrielle. L'idée est que la vie en société impose qu'on supporte certains inconvénients normaux de voisinage, des pollutions ou des nuisances admissibles jusqu'à un certains seuil variant en fonction des circonstances (quartier, etc.). Au-delà de ce seuil, le droit à réparation est admis parce qu'il y a inconvénient anormal ou dommage anormal.
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