Quel prix pour la neutralité carbone anglaise?
Le 07 juin 2019 par Valéry Laramée de Tannenberg
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Le débat fait rage entre la première ministre britannique et son ministre des finances. Explications.
Une question agite le gouvernement britannique: la neutralité carbone, combien ça coûte? La réponse est d’autant plus attendue que le gouvernement de Theresa May (démissionnaire) entend, dès la semaine prochaine, faire voter une loi qui engagera le Royaume-Uni dans cette voie. Jusqu’à présent, le Climate Change Act de 2008 oblige le royaume à diviser par quatre ses émissions entre 1990 et 2050.
Et cela a plutôt bien commencé. Entre 1990 et 2016, les émissions britanniques de gaz à effet de serre (GES) ont chuté de près de 40%, indique un rapport de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), publié le 6 juin. Une performance unique au monde pour un pays industrialisé[1].
politique insuffisante
C’est la suite qui s’annonce compliquée. L’AIE estime que la décarbonation devrait se poursuivre; le seuil des 50% de baisse d’émission pouvant être atteint dès 2030. Insuffisant, estime le comité pour le changement climatique (CCC). Dans une note, mise en ligne début mai, le pendant britannique au Haut conseil pour le climat affirme que la politique énergie-climat actuellement mises en œuvre ne suffira pas à pour atteindre les objectifs fixés par la loi de 2008.
Et le CCC d’appeler à une accélération du déploiement des énergies décarbonées, à l’amélioration des performances énergétiques des logements et des bureaux, à l’électrification du parc de voitures, à l’arrêt de la mise en décharge des déchets putrescibles, au changement des pratiques agricoles. Couplé à un accroissement des surfaces forestières (puits de carbone), cet ambitieux programme doit permettre à Londres d’atteindre la neutralité carbone au milieu du siècle, en investissant 50 milliards de livres par an (56 milliards d’euros).
70 milliards de livres
C’est ce chiffre que conteste Philip Hammond. En début de semaine, le chancelier de l’échiquier (ministre des finances) a envoyé son propre devis à la première ministre. Révélé par le Financial Times, cette missive estime à 70 milliards de livres par an le montant de l’investissement à consentir pour atteindre le fameux net zero emission: un montant 40% plus élevé que celui du CCC.
La différence entre les deux évaluations tient au fait que le ministère des finances comptabilise aussi les soutiens publics dont devront bénéficier certaines industries énergivores ou fortement émettrices, comme l’acier ou l’agriculture, durant la période de transition.
Pressenti pour devenir le prochain premier ministre, Boris Johnson a indiqué sur Twitter être favorable à l’objectif de neutralité carbone.
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