Les Hauts-de-France : not lost in adaptation
Le 23 janvier 2019 par Valéry Laramée de Tannenberg, envoyé spécial
Géorisques
Depuis deux décennies, experts et élus testent les solutions qui permettront aux territoires de la région de s’adapter aux multiples conséquences, qui se conjuguent souvent, du réchauffement. Des idées qui commencent à structurer l’action publique. Exemples choisis.
Pour certains territoires, l’adaptation aux conséquences des changements climatiques n’est pas un concept flou. L’Aquitaine, hier, et la Nouvelle-Aquitaine, aujourd’hui, mobilise des centaines de scientifiques régionaux pour évaluer, régulièrement, les effets du réchauffement sur l’environnement et les activités locales. Une somme de travail que les responsables d’Acclimaterra utilisent pour sensibiliser les représentants des institutions socio-économiques sur les changements de pratiques ou d’activités à envisager à court ou moyen termes.
Avec sa COP régionale, la Bretagne préfère réinterpréter la partition du Grenelle de l’environnement pour sensibiliser élus, agriculteurs, entreprises, et chambres consulaires aux nécessités du changement.
Le réchauffement va plus vite que prévu
Des modes d’action au goût d’anachronisme à l’aune de l’urgence climatique. «Le changement climatique va beaucoup plus vite que prévu. Il ne se passe pas une semaine sans que l’on découvre de nouveaux impacts», résume Hervé Pignon, directeur régional de l’Ademe des Hauts-de-France. Un message bien compris localement. Voilà 18 ans que le centre ressource du développement durable (Cerdd) de Loos-en-Gohelle compile les données, sensibilise les élus, met en valeur les bonnes pratiques, via des Climatours.
Soutenue par l’Europe, l’Ademe, la région, l’agence de l’eau et les départements du Nord et du Pas-de-Calais, ce groupement d’intérêt public anime, depuis 5 ans, un réseau d’une cinquantaine d’acteurs publics, d’élus, d’agences d’urbanisme, d’entrepreneurs et de chercheurs. Une seule motivation: préparer, collectivement, l’adaptation au réchauffement d’une des régions les plus menacées de l’Hexagone.
Par quoi commencer?
«Entre 1955 et 2016, la température moyenne a augmenté de 1,8°C, à Lille[1]. Sur la même période, le volume des pluies a progressé de 13 %, et les épisodes pluvieux se concentrent hiver, en événements toujours plus violents. A Dunkerque, le niveau de la mer du Nord s’est élevé de plus de 9 cm. Au total, plus de la moitié des communes de la région sont désormais vulnérables aux risques thermosensibles: inondations, coulées de boues, sécheresses», explique Emmanuelle Latouche, directrice adjointe du Cerdd.
Face à une telle avalanche d’effets, par quoi commencer? «On a suffisamment de données pour se projeter dans un avenir réchauffé et hiérarchiser les priorités», temporise Christiane Bouchart, vice-présidente de la métropole européenne de Lille (MEL) en charge du développement durable. L’une d’elles est le retrait-gonflement des argiles (RGA): inévitable conséquence de successions rapides de climats humide et chaud. «220 logements dans 14 communes de l’agglomération sont déjà gravement fissurés», comptabilise la conseillère municipale de Lille.
changement de culture
Aux bilans, aux études succèdent les préconisations et la planification. Suite aux campagnes de végétalisation urbaine (pour rafraîchir les villes et isoler les façades) et de plantations de haies (réductrices de risques liés aux inondations), les services techniques de la MEL ont élaboré un guide méthodologique de la renaturation, dont l’Ademe devrait prochainement s’inspirer, au plan national.
Autre «client» du Cerdd, le Grand Douaisis. Regroupant 65 communes et 4 «interco», ce territoire a déjà réalisé un plan climat en 2009, révisé six ans plus tard. «Ils étaient très focalisés sur les économies d’énergie. En élaborant le projet de schéma de cohérence territorial [SCOT], nous avons fait percoler l’adaptation et l’économie des ressources naturelles dans toutes les thématiques», indique Capucine Leclercq.
Les futurs PLU qui en découleront devront tenir compte des risques de RGA. Des surfaces de terrain seront interdites de bétonisation, voire renaturées, pour favoriser l’infiltration des eaux pluviales. «Nos réseaux ne sont plus capables d’absorber l’eau des événements pluvieux extrêmes», explique la responsable du pôle climat du syndicat mixte.
Devant être adopté à la fin de l’année, le plan climat air énergie territorial (PCAET) complétera le programme. «Son objectif est la neutralité carbone. Pour l’atteindre, nous devons notamment faire en sorte que les sols absorbent plus de carbone qu’aujourd’hui», souligne Capucine Leclercq. Une autre façon d’annoncer des changements de cultures et de pratiques agricoles.
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