La litière a besoin de biodiversité
Le 26 mai 2014 par Romain Loury
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La litière végétale pourrait se décomposer plus lentement du fait de la baisse de biodiversité, aussi bien chez les végétaux que chez les organismes décomposeurs, révèle une étude européenne publiée dans la revue Nature.
Menée par l’équipe de Stefan Hättenschwiler, du Centre d’écologie fonctionnelle et évolutive (CEFE, CNRS) de Montpellier [1], l’étude démontre un peu plus la complexité du processus de dégradation de la litière végétale. Les chercheurs ont mené leurs expériences en 5 lieux au climat très divers: subarctique, boréal (tous deux en Suède), tempéré (Pays-Bas), méditerranéen (Pyrénées-Orientales) et tropical (Guyane française).
En chacun d’eux, ils ont étudié, dans des conditions contrôlées et parfois sur plusieurs années, la décomposition de végétaux locaux, aussi bien en milieu terrestre qu’aquatique. Premier fait saillant: si les végétaux et les décomposeurs (bactéries, champignons, mille-pattes, amphipodes, termites, etc.) varient d’un lieu à l’autre, le processus est toujours plus rapide lorsque la litière contient plus d’espèces. Et ce, qu’elle repose sur le sol d’une forêt ou au fond d’une rivière.
La décomposition s’avère particulièrement efficace lorsque la litière se compose d’arbres fixateurs d’azote et d’arbres caducs, riches en carbone. Selon les chercheurs, un transfert d’azote s’opérerait des premiers vers les seconds, qui constituent dès lors un lieu idéal pour les décomposeurs: ceux-ci disposent ainsi en abondance de deux éléments fondamentaux, azote et carbone.
Au vu de ces résultats, quel pourra être l’impact de la baisse de biodiversité? S’il est trop tôt pour le dire, Stephan Hättenschwiler, interrogé par le JDLE, estime qu’une moindre décomposition de la litière «pourrait perturber le recyclage des éléments, dont la disponibilité deviendrait moindre pour les végétaux». Comprendre: du fait d’une moindre dégradation de la litière, les sols deviendraient moins riches en éléments essentiels aux végétaux.
Au final, il pourrait en résulter «un changement de la composition des communautés», aussi bien celle des végétaux que celle des décomposeurs, avance le chercheur montpelliérain. En bref, «tout est lié»: la moindre biodiversité ralentit la décomposition de la litière, ce qui entraînera appauvrissement des sols, modification des végétaux et des organismes décomposeurs… lesquels entraîneront de nouveaux effets sur la litière. Une évolution dont nul ne sait encore sur quoi elle débouchera.
[1] En collaboration avec des chercheurs allemands, canadiens, finlandais, hollandais, suédois et suisses.
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