La conférence de Paris ouvre sous un mauvais karma
Le 20 juillet 2015 par Valéry Laramée de Tannenberg
Paris accueille une quarantaine de négociateurs. Objectif: accélérer la rédaction d’un projet d’accord pour la COP 21.
Le ministre des affaires étrangères Laurent Fabius accueille, ce lundi 20 juillet, une quarantaine de responsables nationaux des négociations climatiques. Objet de ces deux jours de «consultations informelles ministérielles»: discuter les thèmes-clés du futur accord international sur le climat qui devra être trouvé à Paris en décembre. Plus prosaïquement, il s’agit de réduire à quelques feuillets les 136 pages (dans sa version française) du texte de négociation, issu du round de février dernier. Importantes, les tractations parisiennes ne sont pas pour autant le rendez-vous de la dernière chance.
Les chefs d’Etat décident
En septembre, l’ONU et la France organisent, à New York, un sommet des chefs d’Etat. Une rencontre plus importante encore que celle du Quai d’Orsay, «car ce sont les chefs d’Etat et de gouvernement qui font les accords, pas leurs négociateurs techniques», rappelait récemment l’ancien ministre au développement, Pascal Canfin. D’autres réunions multilatérales seront autant d’occasions de rapprocher les points de vue: la réunion des gouverneurs de la Banque mondiale à Lima, début octobre, ou le sommet du G20 d’Antalya mi-novembre[1].
A priori, la réunion de travail parisienne a débuté sous de bons auspices. Ces derniers jours, deux nouveaux pays ont publié leurs engagements nationaux (INDC). Dans une INDC assez détaillée, le Japon a annoncé, vendredi 17 juillet, son intention de réduire de 26% ses émissions de gaz à effet de serre (GES) entre 2013 et 2030. Tokyo s’engage donc à baisser de 3% ses rejets de GES entre 1990, année de référence de l’ONU, et 2030. Une très belle performance![2]
Tout aussi symbolique, les îles Marshall ont aussi présenté leur catalogue de bonnes nouvelles. Le premier Etat insulaire à déposer son INDC prévoit de réduire de 32% ses émissions entre 2010 et 2025. En gros, Majuro prévoit d’amener les émissions de l’archipel à 70.000 tonnes par an, en 10 ans.
15 à 20% des efforts
Rien qui suffise à remettre le climat sur de meilleurs rails. Le 8 juillet dernier, au cours de la conférence de l’Unesco Our Common Future, plusieurs climatologues avaient dressé un premier bilan des INDC. S’appuyant sur les 18 catalogues de promesses publiés en juin[3], Michel Den Elzen, de l’agence d’évaluation environnementale des Pays-Bas (PBL), avait estimé que, au mieux, seuls 15 à 20% des efforts nécessaires pour stabiliser le réchauffement à 2°C étaient programmés. Diagnostic confirmé par les climatologues du Climate Action Tracker. Ils ne seront pas démentis par les gouvernements japonais et des Îles Marshall.
La solution viendra-t-elle de la société civile? Rien n’est moins sûr. Depuis quelques mois, entreprises, collectivités et investisseurs sont priés de publier leurs engagements sur la plate-forme Nazca, mise en ligne après le sommet climatique de Lima. A ce jour, près de 2.800 actions ont été répertoriées, sans qu’on puisse en évaluer l’intérêt climatique.
Fort heureusement, l’industrie pétrolière devrait arriver à la rescousse. Unis dans l’Oil and Gas Climate Initiative, 8 compagnies pétrogazières[4] promettent de présenter, en octobre, les bonnes pratiques qui leur permettront de réduire leur empreinte carbone. Le monde retient son souffle.
[1] On y parlera notamment de finance carbone.
[2] Sur cette période, l’UE s’engage à abattre de 40% ses émissions.
[3] Couvrant 55% des émissions mondiales.
[4] BG Group, BP, ENI, Pemex, Aramco, Shell, Total et Sinopec produisent 16% des hydrocarbures mondiaux.
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