Biodiversité: l’Etat condamné pour un décret enterré depuis 8 ans
Le 14 mai 2018 par Marine Jobert
Le Conseil d’Etat condamne l’Etat pour ne pas avoir pris un décret qui fixe les habitats naturels, qui bénéficieront d’une interdiction de destruction, d’altération ou de dégradation.
Pour bien protéger, il faut nommer. Et c’est ce que l’Etat se refuse à faire depuis maintenant huit ans et l’adoption des articles L.141-1 et 142-2 du code de l’environnement. Ceux-ci prévoient la publication d’un décret en Conseil d’Etat, qui détermine les conditions dans lesquelles sont fixées «la liste limitative des habitats naturels, des espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées ainsi que des sites d'intérêt géologique, y compris des types de cavités souterraines, ainsi protégés». Or, depuis la loi dite «Grenelle II» du 12 juillet 2010, les gouvernements successifs ont omis de publier ce texte, ce qui vaut à l’Etat une condamnation prononcée ce 11 mai par le Conseil d’Etat.
Compléter Natura 2000
Certes, rappelle la juridiction administrative dans sa décision, deux autres textes avec une finalité approchante existent déjà. D’une part un arrêté de 2001 qui précise la liste des types d'habitats naturels et des espèces de faune et de flore sauvages qui peuvent justifier la désignation de zones spéciales de conservation au titre du réseau écologique européen Natura 2000. D’autre part la faculté confiée aux préfets de prendre des arrêtés afin de conserver certains biotopes dans le but de prévenir la disparition d'espèces figurant sur la liste prévue à l'article R. 411-1 du code de l'environnement. Il n’en demeure pas moins, estime le Conseil d’Etat, que le Premier ministre a failli en n’exerçant pas «sa compétence pour déterminer cette liste limitative des habitats naturels à protéger».
6 mois pour un décret
Ce recours, engagé par la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO), doit permettre de mettre réellement en œuvre l’interdiction de destruction, d’altération ou de dégradation des habitats naturels votée en 2010 et d’aller au-delà de la protection communautaire de Natura 2000. Celle-ci «repose essentiellement sur une base contractuelle et de ce fait n’est pas considérée comme une protection forte», souligne la LPO et ne s’étend pas aux territoires d’outre-mer, «là où la biodiversité est la plus riche et souvent la plus vulnérable». Le Premier ministre a 6 mois pour prendre le décret, sous astreinte de 500 euros par jour de retard.
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